Les établissements d’enseignement musical procèdent ou font procéder par leurs élèves à des photocopies des œuvres musicales…
qu’ils étudient ou qu’ils utilisent à l’occasion de leurs exercices et examens.
La SEAM, société de perception et de répartition prévue et régie par les articles L.321-1 er suivants du Code de la propriété intellectuelle, est cessionnaire du droit de reprographie des auteurs et éditeurs, conformément aux dispositions de l’article L.122-10 du même code.
La SEAM peut seule conclure avec les utilisateurs toute convention aux fins de gestion du droit de reprographie cédé.
La SEAM propose une convention dite « ÉCOLE DE MUSIQUE » pour la reprographie de une à trente pages par élève et par an d’extraits d’œuvres imprimées de son répertoire (Les œuvres des catalogues de ses membres).
Cette convention ne s’adresse pas aux établissements qui dépendent de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de l’enseignement privé ou de l’enseignement agricole : la SEAM a passé des conventions spécifiques avec ces établissements et perçoit via le Centre Français d’exploitation du droit de Copie (CFC).
Les œuvres en objet de la « convention SEAM »
Des directeurs d’établissements et des professeurs témoignent régulièrement que la SEAM perçoit indistinctement, sur le fondement d’un acte dit « convention Écoles de musique », des redevances sur les œuvres du domaine protégé comme sur les œuvres du domaine public.
Rappelons d’abord que la SEAM est une société civile, composée d’auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, qui lui apportent de plein droit leur droit de reprographie, conformément aux dispositions de l’article L.122-10 du Code de la propriété intellectuelle.
Comme toute société de perception et de répartition de droits d’auteur ou de droits voisins, elle bénéficie d’un agrément du ministère de la culture, organisme de tutelle pour le service public qu’elle gère.
Mais la SEAM confond en fait la protection du support de l’œuvre, la partition éditée, avec la protection de l’œuvre elle-même, et détourne ainsi au bénéfice de l’entreprise d’édition la protection de l’œuvre musicale.
L’éditeur ne tient ses droits qu’en vertu des dispositions légales du droit d’auteur et des contrats d’édition qu’il aura pu passer avec des auteurs.
L’éditeur ne détenant de droits sur des œuvres de l’esprit qu’autant que leurs auteurs lui en aient confiés l’exploitation, les droits de l’éditeur sont circonscrits aux propres droits de son cédant, l’auteur.
Les droits de l’éditeur sur les œuvres de son catalogue suivent donc strictement ceux des auteurs ; sauf les droits propres de l’éditeur sur son fonds de commerce et notamment ses droits sur ses marques, son nom, son matériel. Mais il ne s’agit plus alors du droit des auteurs de son catalogue ni du droit de reprographie au sens de l’article L.122-10 du CPI.
Les droits de l’éditeur sur les œuvres de ses auteurs cessent à l’échéance de la durée de protection : l’éditeur ne peut donc revendiquer une rémunération assise sur les œuvres de son catalogue après le terme de la durée de protection, généralement soixante-dix ans après l’année du décès de l’auteur.
Les bases de la rémunération perçue par la SEAM
La SEAM a déterminé unilatéralement le taux et l’assiette des redevances perçues auprès des établissement d’enseignement de musique après sa rupture unilatérale de négociations ouvertes avec l’UNDC.
Rien ne permet de justifier le taux et l’assiette retenue par la SEAM ni pour quelles raisons elle opère une discrimination entre les établissements territoriaux d’éducation musicale d’une part, les établissements nationaux ou territoriaux d’enseignement général ou agricole, publics ou privés, du secondaire ou du supérieur, d’autre part.
(Cf Protocole d’accord sur la reproduction par reprographie d’œuvres protégées conclu le 17 novembre 1999 entre le Ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie d’une part, le CFC et la SEAM d’autre part ; Contrat type pris en application de ce protocole pour autorisation de reproduction par reprographie d’œuvres protégées dans le cadre d’un établissement public d’enseignement secondaire général ; Contrat type à destination d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, élaboré conjointement par la Conférence des Présidents d’Université (CPU), le CFC et la SEAM aux termes d’un protocole d’accord signé le 17 novembre 1998 ; Contrat type à destination des établissement d’enseignement sous tutelle du ministère de l’agriculture)
Paradoxalement, la SEAM a décidé unilatéralement la fixation de taux de perception sensiblement plus élevés à l’endroit des établissements d’enseignement musical. Une telle discrimination freine la diffusion de la musique au sein même des établissements où cette diffusion pourrait produire le plus d’effets induits pour l’ensemble des métiers de la musique. Les élèves des écoles de musique et des conservatoires sont évidemment de futurs utilisateurs et prescripteurs potentiels de musique écrite, contrairement aux autres élèves des établissements d’enseignement général.
L’abus de position de la SEAM
Les créateurs contemporains souhaitent logiquement la promotion artistique de leur œuvre avant une vaine exploitation commerciale : la promotion et la protection des œuvres et des auteurs précèdent en droit et en fait l’exploitation commerciale de l’éditeur.
Soumettre abstraitement les auteurs nouveaux et inconnus à la même gestion, strictement marchande, que celle mise en œuvre pour les auteurs et les œuvres renommés, conduit à promouvoir les œuvres déjà promues du domaine protégé, les fonds de catalogue des éditeurs et les œuvres anciennes ou classiques du domaine public. Une telle gestion compromet en tout état de cause la création artistique et l’essor des auteurs et des œuvres.
Si la SEAM est titulaire de la gestion du droit de reprographie, l’auteur ne reste pas moins celui qui définit seul les conditions d’exploitation de ses œuvres conformément aux dispositions des articles L.122-1, L.122-7, L131-3 et L.131-4 du CPI.
Des auteurs compositeurs de musique auraient souhaité, pour leur promotion, la diffusion gratuite ou à moindre coût de leurs œuvres au sein des établissements d’enseignement musical. Il subissent au contraire le taux de reprographie le plus élevé au sein de ces établissements et alors qu’il est peu probable et même impossible qu’ils soient promus via les établissements d’enseignement général.
Certains de ces auteurs compositeurs auraient été sanctionnés par leurs éditeurs qui les auraient exclus. Une telle sanction constitue encore une infraction au droit de la concurrence.
La SEAM a décidé unilatéralement de soumettre les établissements d’enseignement musical à des conditions qui ne satisfont :
– ni les professionnels et futurs professionnels des métiers de la musique, utilisateurs et promoteurs des œuvres ;
– ni les nouveaux créateurs, titulaires de droits dont la promotion est détournée au bénéfice des œuvres déjà renommées ;
– ni le public.
Le seul objectif de la SEAM apparaît être la limitation du droit de reprographie, au préjudice de l’intérêt général lié à la diffusion des œuvres ou à l’enseignement et pour le seul bénéfice des éditeurs tiré de la vente de partition.
Annexe I- Projet de convention pour la gestion du droit de reprographie des partitions musicales dans le cadre de l’enseignement public
Entre le CFC et la SEAM
D’une part,
Le ministère de la culture,
D’autre part,
Les Parties ont décidé de poursuivre une convention qui concilie l’intérêt général lié à l’enseignement musical et le monopole d’exploitation des auteurs sur les oeuvres.
Les Parties rappellent que l’intérêt lié à l’enseignement musical et les intérêts patrimoniaux des auteurs ne sont pas antinomiques, au contraire : le goût du public pour la musique suppose son enseignement préalable.
Les Parties rappellent également que l’auteur est protégé dans ses intérêts patrimoniaux et moraux, non pas à des fins privées, mais dans l’intérêt général, afin de permettre la vie et la vitalité des auteurs et la perpétuation et le renouvellement des œuvres
Article 1er : Redevance forfaitaire
Les Parties décident de transposer à l’enseignement musical les dispositions qui régissent actuellement l’éducation nationale à savoir : 1,52 Euros par élève pour 180 copies annuelles.
Cette redevance forfaitaire comprend :
a- La reprographie d’œuvres protégées dans le cadre de classes de disciplines dites théoriques ou de formation musicale : analyse, écriture ;
b- La reprographie d’œuvres protégées dans le cadre de classes d’instrument ;
c- La reprographie d’œuvres protégées pour leur utilisation par les membres d’un jury d’examen ou de concours ;
d- La reprographie des partitions « conducteur » du matériel d’orchestre acheté ou loué pour chacun des élèves d’une classe d’ensemble ;
e- La reprographie d’œuvres protégées pour leur utilisation par les candidats à des concours ou examens publics.
Article 2 : La reprographie d’œuvres protégées dans le cadre de classes de musique d’ensemble : musique de chambre, classes de chorale, ensemble vocaux
Les Parties reconnaissent que, quel que soit le contrat, location ou vente de matériel d’orchestre, l’établissement public d’enseignement musical doit être en mesure de jouir de la chose louée, conformément aux principes généraux du droit en matière de vente ou de location.
En conséquence, les Parties reconnaissent que l’établissement d’enseignement n’est pas soumis au droit de reprographie pour la reproduction de partitions louées ou achetées comme matériel d’orchestre :
– Il peut s’agir de reprographie « par précaution » : le professeur est susceptible de remettre les partitions à des enfants, jeunes élèves dont on ne peut attendre le meilleur soin.
– Il peut s’agir aussi de reprographie pour combler l’effectif nécessaire de l’orchestre de l’établissement ou pour combler des partitions indisponibles ou « manquantes » dans le matériel de l’éditeur.
Les Parties reconnaissent que, conformément à l’article 1er, chacun des élèves pourra disposer de la reproduction de la partition « conducteur », en plus de sa propre partition, pour suivre l’exécution d’ensemble.
Article 3 : La reprographie partielle d’œuvres protégées dans le cadre de « tourne » (reproduction du verso d’une partition pour permettre à l’instrumentiste de poursuivre son exécution)
Les Parties rappellent que les droits sur une partition, comme tout droit d’auteur sur toute œuvre, sont de nature incorporels.
Les Parties admettent, en conséquence, que l’acquisition d’une partition se résout à l’acquisition d’un droit de reproduction sur une œuvre, intégralement, sans discontinuation. Seules des contraintes techniques imposent une rupture de lecture.
La reprographie dans le cadre de « tourne » ne constitue la mise en œuvre d’un droit supplémentaire à celui acquis par l’établissement d’enseignement.
Les Parties conviennent, en conséquence, que la photocopie partielle dans le cadre de « tourne » ne donne pas lieu à droit supplémentaire de reprographie.
Article 4 : Contrôle via les agents assermentés des sociétés de perception
La société de perception exerce son contrôle via ses agents assermentés par le ministère de la culture, conformément aux dispositions du Code de la propriété intellectuel, pendant les heures d’ouverture des établissements.
Les agents ne pénètrent dans les classes lors des cours qui y sont dispensés qu’avec l’autorisation du Directeur de l’établissement.
La société de perception ne procède à aucune vérification en dehors des lieux et des documents directement accessible au public, sauf à se faire autoriser par le juge judiciaire, garant des libertés individuelles.
Article 5 : Durée
La présente convention entre en vigueur avec effet rétroactif au 1er janvier 2003 pour une période de trois années.
Elle sera reconduite tacitement sauf dénonciation six mois avant son échéance par l’une des Parties.
Article 6 : Publication
La présente convention sera publiée au Bulletin officiel du ministère de la culture.
Annexe II- La constitution d’un registre national des œuvres du domaine protégé
Un tel formalisme résoudrait la difficulté pour les établissements d’enseignement musical, et le public en général, de savoir si tel compositeur appartient au domaine protégé ou payant.
Nous suggérons la constitution d’un état conservatoire des auteurs français figurant dans le domaine protégé.
Cet état serait constitué sur la déclaration des auteurs et des éditeurs. Le défaut de déclaration présumerait, pour les établissements d’enseignement musical seulement, l’appartenance au domaine public.
Ce système aurait aussi l’avantage de permettre aux créateurs contemporains qui le souhaitent de déroger aux dispositions de l’article L.122-10 du Code de la propriété intellectuelle et d’assurer la promotion de leur œuvre avant une vaine exploitation commerciale.
Les auteurs souhaitant laisser leurs œuvres libres de droit de reprographie le déclareraient par mention à cet état conservatoire.
La promotion et la protection des œuvres et des auteurs précèdent en droit et en fait l’exploitation commerciale de l’éditeur. Et c’est bien au créateur de déterminer les conditions d’exploitation de son œuvre.
Il semble aussi conforme à la finalité du droit d’auteur de laisser aux auteurs le soin d’organiser librement l’accès du public à leurs œuvres.
Un tel registre mettrait fin à la situation actuelle, proprement aberrante, où les établissements d’enseignement versent des redevances de droit d’auteur pour des reprographies sur des œuvres du domaine public !
Il semble enfin conforme au principe général du droit selon lequel « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver » (article 1315 du Code civil) d’imputer la charge d’une telle déclaration aux ayants droit, auteurs ou éditeurs.
Annexe III- La location du matériel d’orchestre
Parallèlement à la question spécifique de la reprographie, les établissements d’enseignement musical déplorent généralement les difficultés d’accès au matériel d’orchestre, notamment les délais imposés par les éditeurs.
De tels délais sont incompatibles avec la mission de service public des établissements d’enseignement musical.
La constitution de bibliothèques publiques municipales de matériel d’orchestre permettrait une meilleure fluidité et une meilleure diffusion des œuvres.
Ces bibliothèques publiques pourraient être décentralisées dans les Conservatoires Nationaux de Région.
La directive « droit d’auteur » permettrait l’adoption d’une exception, possible en faveur des bibliothèques publiques, pour la location de matériel, détenu par une telle bibliothèque, par un établissement public d’enseignement musical, en franchise de redevance de droit d’auteur.
Annexe IV- L’édition d’œuvres du domaine public au sein des établissements d’enseignement musical
Ces œuvres musicales du domaine public peuvent être librement éditées par les établissements d’enseignement, dans le cadre de leurs missions, sous réserve de ne pas tirer indûment profit du travail réalisé par un éditeur (Concurrence déloyale, parasitisme)
Conformément à l’avis OFRATEME du Conseil d’Etat (21/11/72) et à la jurisprudence DIRECT MAIL PROMOTION (CE 10/07/96) de telles éditions, dans l’objet du service des établissements d’enseignement, investiraient ceux-ci de droits de propriété intellectuelle sur les éventuelles créations qui seraient alors réalisées (adaptation, transposition, notation …) dès lors qu’il s’agirait d’un travail créatif, original et personnalisé, des agents de l’établissement.
Il conviendrait que ces fonctions et ces missions des établissements d’enseignement apparaissent clairement dans leurs statuts afin qu’apparaissent aussi les postes afférents (copistes …)